Le CANIGOU, toute une histoire... en bref.

Cet astronome mit fin à la rumeur devenue galéjade 'marseillaise' qui prétendait que l'on pouvait apercevoir une chaîne de montagne, le Canigou, sur l'horizon au large de Marseille. Il fit lui même l'observation de ce phénomène depuis Notre Dame de la Garde en 1808, et confirma la réalité du phénomène et qu'il s'agissait bien des montagnes des Pyrénées. Cette observation est rendue possible sous certaines conditions d'alignement avec le soleil, phénomène expliqué par la réfraction atmosphérique.

Le Baron Franz Xaver von Zach (4 Juin 1754 - 2 Septembre 1832) était un astronome autrichien né à Pest (Hongrie).

Le baron Zach a fait ses études notamment en France et en Angleterre. En 1786 le duc de Saxe-Gotha, Ernst II, lui demande de créer son observatoire de Seeberg. La même année ils se rendent dans le sud de la France, à Hyères, et à cette occasion l'une des tours du mur d'enceinte de la ville est transformée en observatoire. En 1809, Zach et la duchesse régnante viennent près de Marseille et, lors de plusieurs voyages dans le sud de la France, Zach exécute des travaux géodésiques et astronomiques. Dans son "Journal", il mentionne les astronomes français, notamment ceux de la France méridonale auxquels il apporte son soutien. Il effectue un long séjour à Marseille jusqu'en 1814.

Site en référence : voir l'article de Y. GEORGELIN et S. ARZANO de l'Observatoire de Marseille à l'origine du regain d'intérêt pour ce phénomène.

Dessin attribué au Baron de Zach

Reproduction du dessin original appartenant aux archives du Musée de l'Observatoire de Marseille, dont voici le texte:

(une lieue terrestre vaut 4,444 km, la toise vaut 1,949 m)

"Profil du mont Canigou dans les Pyrénées orientales, à neuf lieues sud-ouest de Perpignan.
Il est élevé de 2785 mètres (1429 toises, 89 centièmes)... Vu la première fois le 14 octobre 1801 peu après le coucher du soleil, et depuis lors plus de 25 fois: il est éloigné de 130 000 toises environ; mais pour l'apercevoir des environs de Marseille, il faut s'élever d'environ de 80 à 85 toises... Du pont levis de Notre Dame de la Garde on ne voit guère que le sommet principal: mais du haut du rempart c'est presque toute l'étendue du profil, dans la direction du cap méridional des isles... des collines du quartier de St Joseph, on le voit dans la direction du village de St Louis... une seule fois il nous a paru sur deux plans différens.

Je n'ai trouvé en ville que ce profil avec des observations tracées avec un encre blanchâtre sur les traits desquelles j'ai repassé. En attendant que je vous apporte de la campagne quelque chose de mieux, vous voudrez bien, Monsieur, vous contenter de ce travail informe. Si j'en avais eu le loisir, j'aurais calqué et recopié le tout. J'ai d'ailleurs quelques autres détails à ajouter.

Votre dévoué .... BF"


Ce texte appelle quelques remarques
:

  • Il est indiqué qu'une première observation a été faite le 14 octobre 1801. Cela ne peut pas correspondre à une date d'alignement avec le Soleil pour Marseille. Il s'agit donc d'une observation après le coucher du Soleil, pour éviter l'éblouissement, et faite dans des conditions météo particulièrement favorables avec un ciel très lumineux comme cela arrive encore parfois de nos jours et sans pollution.
  • Il est question de plus de 25 observations. A supposé que ce texte date de 1808(?) soit 8 années d'observation relatées depuis lors, cela représenterait 16 observations sur la ville au maximum avec à chaque fois de bonnes conditions météo. Comme cela semble improbable, cela veut dire qu'il y a eu des récits d'observation qui ont pu être rapportés concernant d'autres lieux.
  • Enfin l'alignement sur le massif du Canigou est possible depuis N. D. de la Garde les 10 et 11 février et ensuite autour du 30 octobre. La date du 8 ne correspond pas a un alignement exact. C'est d'ailleurs ce qui ressort du texte de Zach, que je reproduirai un peu plus loin, ou il signale ne l'avoir observé qu'après le coucher du Soleil indiquant bien que l'alignement n'était pas obtenu car alors il aurait aperçu le profil de la chaîne sur le disque solaire. Je pense qu'il avait dû anticipé sur de mauvaises conditions météo pour les dates du 10 et 11 février et tenté l'observation deux jours avant, soit avec un décalage d'environ 1 degré. De mon expérience cela est tout à fait possible et le Canigou a d'ailleurs pu être observé à des dates très distantes des dates d'alignement avec le Soleil lorsque les conditions météo sont favorables, c'est à dire avec un voile nuageux suffisamment ténu pour servir d'arrière plan très lumineux mais avec un ciel parfaitement dégagé sur tout le trajet.

 

Voici le récit du Baron de Zach :
:
" ...L'an 1808, j'étais à Marseille.  Le jour du 8 février fut remarquablement beau et serein. Je me transportai dans l'après-midi, avec mes instruments, sur la montagne Notre-Dame de la Garde ; plusieurs savants et amateurs m'accompagnèrent pour être témoins de l'expérience. "Après avoir pointé ma lunette sur le point de l'horizon où devait se trouver le Canigou, nous ne vîmes rien d'abord ; le Soleil donnait droit dans la lunette et devait par conséquent empêcher toute vision distincte des objets terrestres, soit avec des instruments d'optique, soit à la vue simple ; ce n'était qu'après le coucher du Soleil que le spectacle devait avoir lieu. Cet astre s'approchant de l'horizon, nous attendîmes avec impatience son coucher ; à peine le dernier rayon avait-il disparu que, comme par un coup de baguette, nous vîmes pour ainsi dire tirer le rideau et une chaîne de montagne noire comme jais avec deux pics élevés vint, au point nommé, frapper nos regards avec tant d'évidence et de clarté que plusieurs spectateurs eurent peine à croire que ce fussent les Pyrénées ; on les aurait prises pour des montagnes du voisinage, tant elles paraissaient distinctes et proches de nous ! Tandis que nos spectateurs s'émerveillaient , faisaient leurs réflexions, je me dépêchai d'observer ces pics et de tracer le dessin de leur contour ; puis balayant l'horizon avec ma lunette, je découvris au nord le sommet du Mont Ventoux (altitude 1912 mètres et 100 km de distance), près de Carpentras, lorsque la nuit tombante mit fin à toutes mes observations.  

Exceptionnelle plaque photographique d'Oscar Gross
du Canigou vu depuis Marseilleveyre
le 13 février 1898

Cette image est un véritable document historique tout à fait remarquable que l'on doit au photographe Oscar Gross.
Le 13 février 1898, il réalise plusieurs photographies depuis Marseilleveyre lors de l'observation du Canigou organisée par la Société des Excursionnistes Marseillais qui avait réuni une centaine de personnes. Je vous en laisse apprécier la prouesse technique!
C'est grâce à Monsieur Gabriel Plancher que j'ai le plaisir de porter à votre connaissance ce cliché qu'il détient depuis longtemps dans sa famille. J'ai ajouté en médaillon le détail du Canigou dans le coin droit supérieur pour apprécier la remarquable qualité de cette photographie. Je remercie vivement Monsieur Plancher pour son aimable autorisation qui me permet de rendre cette image accessible à tous les passionnés de l'observation du Canigou.

Le cliché a été réalisé avec une plaque au lactate d’argent de Guilleminot & Cie, “La Parfaite” de 8 1/2 X 10 cm.

Oscar Gross:
Actif de 1865 à 1913, il est signalé comme photographe à Paris. Il possédait peut-être un studio à Marseille et à Paris.
On lui doit, dans les dépôts de 1906 à Marseille, la seconde des plus anciennes photographies datées du Musée des photographies ; elle représente "la Bourse, la Canebière et le Vieux-Port en 1865".
Il est alors installé comme photographe 8, rue Jaubert, c'est à dire lui aussi, dans les nouveaux quartiers de la Monarchie de Juillet.
De ce photographe est également déposée une grande série de prises de vues des festivités du 25e centenaire de la fondation de Marseille (octobre 1899). Il photographie de jour comme de nuit, et nous offre d'étonnants feux d'artifices, ce qui représente un perfectionnement dans l'art de la photographie.
Il est signalé, comme ancien élève du Lycée de Marseille et membre de la société de Photographie de Marseille.
Il est manifestement intéressé à l'évolution des quartiers, ayant pris, probablement vers 1912, un certain nombre de photographies, de détails de portes en particulier, du quartier de la Bourse voué à la destruction.

 

Carte postale ancienne du Canigou vu de Marseille

Cette reproduction de la carte postale concernant le Canigou vu de Marseille se trouve sur le site du Ministère de la Culture. Cette carte postale a été éditée vraisemblablement entre 1903 et 1920, information qui m'a été transmise par le service des données de Joconde*. Je remercie ici ce service qui me permet de diffuser cette image ainsi que les suivantes sur mon site, avec leur aimable autorisation.

*JOCONDE est le catalogue collectif des collections des musées de France, accessible sur Internet.

 

Carte postale ancienne de la colline de la Garde en 1840

Cette autre reproduction provient du site du Ministère de la Culture.

A l’époque romaine, la colline de la Garde avait été choisie pour y établir une vigie ; ce n’est qu’en 1214 que la première chapelle fut construite. C'est Maître Guillaume, de l'abbaye Saint-Victor, qui autorise Maître Pierre à s'établir et à édifier une chapelle sur la colline de la Garde qui culmine à 162 mètres d'altitude (ainsi nommée car à son sommet se trouve le veilleur, garant de la sécurité de la ville). Agrandie plusieurs fois au cours des siècles afin de mieux accueillir des foules de pèlerins de plus en plus denses, elle est ceinturée par un fort en 1536. François Ier engagea de grands travaux pour édifier des remparts sur la colline; ses remparts avaient pour vocation de protéger Marseille des attaques extérieures mais aussi des marseillais qui auraient pu se rebeller contre l’Etat et François Ier.

C'est donc depuis cette colline de la Garde que le 8 Fèvrier 1808 le Baron de Zach fit sa première observation du pic du Canigou accompagné d'autres astronomes de l'Observatoire de Marseille.

*JOCONDE est le catalogue collectif des collections des musées de France, accessible sur Internet.

 

Carte postale ancienne de l'inauguration de N.D. de la Garde en 1864

Cette autre reproduction provient du site du Ministère de la Culture.

En 1853, l'architecte Espérandieu entreprend la construction de la basilique, consacrée le 5 juin 1864 par le cardinal Villecourt. Mais il reste encore de nombreux travaux à accomplir. L'architecte Revoil succède à Espérandieu, et ce n'est qu'en 1917 que s'achève la construction de cette oeuvre collective, le monument de Marseille le plus connu.

La statue de la Vierge à l'enfant, haute de plus de neuf mètres, est exécutée entre 1867 et 1869 sur le modèle du sculpteur Eugène Lequesne dans les ateliers de la maison Cristofle à Paris. La « Bonne Mère » est la patronne des marins et la protectrice de la cité.

*JOCONDE est le catalogue collectif des collections des musées de France, accessible sur Internet.

© Musée national des Arts et Traditions Populaires, © Direction des Musées de France, 2000, © base Joconde

Si vous souhaitez faire des recherches sur le site: http://www.culture.gouv.fr/documentation/joconde/fr/pres.htm